"Par ici, la pluie!": un texte modèle

"Mon amie apparaît. Ses longues jambes brunes sortent de son short comme des branches noueuses. Je chuchote dans un souffle:
-Il va pleuvoir. Mets ton maillot et viens me rejoindre."


L'oeuvre de Karen Hesse intitulée "Par ici, la pluie!" est un album à faire découvrir à vos élèves! C'est un texte poétique et riche de procédés littéraires qui fait appel à l'interpétation.

À travers la lecture, on se laisse glisser dans une atmosphère  règne une chaleur accablante.  On suit les faits et gestes de la petite Tessa qui attend patiemment la pluie.

Voici quelques éléments intéressants à travailler en classe, durant les "ateliers d'écriture":

Tout d'abord l'auteure débute avec un dialogue "Par ici, la pluie" qui nous plonge directement dans le monde de la narratrice, cette petite Tessa qui regarde le ciel et appelle la pluie.

Le choix des mots
L'auteure utilise un langage imagé et très poétique qui séduit le lecteur. Différents procédés stylistiques sont employés: ici elle fait une comparaison: "J'ai l'impression de cuire comme une pomme de terre au four." Là, une métaphore: "(...) ce soleil de plomb". La richesse du vocabulaire et la redondance d'adjectifs viennent renforcer l'atmosphère chaude et humide décrite dans la narration. La pièce est sombre et suffocante, les plantes sont flétries, la mère est moite de sueur et le melon est tiédi par le soleil. Karen Hesse sait comment nous faire ressentir les choses sans les nommer. Elle sait "montrer plutôt que dire".  Le lecteur peut facilement imaginer les tableaux proposés par l'auteure.

Les points de vue
Différents points de vue sont présents dans le texte. Il y a Tessa, la narratrice, qui témoigne de ses observations, au "je". Il y a aussi l'utilisation du pronom "nous" lorsque le personnage est avec ses amies sous la pluie. En plus, l'auteure utilise le pronom "elle" lorsqu'elle parle de la pluie, comme si elle voulait amplifier sa présence dans le récit. Elle ajoute même: "Elle crible nos pieds", comme pour rendre la pluie presqu'humaine.

L'emploi des dialogues
En plus de débuter le texte par un dialogue, l'auteure emploie quelques dialogues pour nous faire découvrir les personnages et leurs émotions. Par exemple, c'est dans la question de la mère à son enfant (seulement à la troisième page de l'album) qu'on découvre le nom du personnage principal. Lorsque la mère dit à sa fille: "Qu'est-ce que je ferais sans toi, Tessa?", ce passage laisse place à l'interprétation mais tout semble démontrer le lien fort qui les unit. Par les commentaires et les questions des personnages, on ressent l'inquiétude de la mère et la joie de la petite. Là aussi, le lecteur doit interpréter et utiliser tous ces indices pour construire du sens.

Descriptions par les sens
Tout comme Céline Comtois, dans l'album "La ruelle", Karen Hesse sait se placer à hauteur d'enfant pour rendre le personnage crédible et nous faire vivre les scènes par les sens. La petite Tessa traverse le sentier, passe devant la maison de Mme Grimard, observe par la fenêtre, grimpe les marches du perron, et va retrouver son amie pour l'inviter à mettre son maillot de bain. On la suit dans ses actions, étape par étape. Certains passages excitent nos papilles, comme par exemple lorsque Tessa met une cuillère de sucre dans sa bouche ou bien chatouillent nos narines, lorsque Tessa sent l'odeur du goudron chaud et des ordures dans la rue.

Les illustrations
Les aquarelles de Jon J. Muth font vraiment partie du récit. On remarque l'utilisation des teintes de jaunes et de gris qui représentent toute la lourdeur, toute la charge d'humidité dans l'air. Le texte tout en poésie, de Karen Hesse est directement inscrit dans l'image. Puis, on aperçoit en double-page, des mains d'enfants pointant un ciel gris qui attendent la pluie. Par le choix des couleurs passant du jaune pâle au jaune miel ou de l'orange à l'ocre, puis aux nuances de gris, on sent une gradation dans l'intensité du moment. Puis, à la toute fin de l'album, une fois la pluie tombée, on sent que l'air frais est revenu grâce aux maisons teintées de bleus et au reflet des personnages dans la flaque d'eau. Les illustrations sont aussi poétiques que le texte. En plus de jouer avec les couleurs pour créer des effets, Jon J. Muth utilise lui aussi, différents points de vue dans ses tableaux. Lorsque la pluie tombe, il fait une vue en plongée des jeunes filles qui accueillent cette pluie, puis, un peu plus loin, on voit la mère, en contre-plongée qui lance son chapeau vers le ciel. Tout cela dynamise la lecture et laisse beaucoup de place à l'interprétation.

Une oeuvre poétique et touchante, à faire apprécier aux élèves!





Commentaires